Inauguration
Pour inaugurer cette catégorie je poste une citation d'un Grand. Samuel Beckett, un auteur de l'Absurde, courant tellement intéressant et profond à lire, mais aussi très compliqué à résumer. Je n'en ferais pas, mais je vous invite à en lire et à allez voir des pièces.
"Ici tout bouge, nage, fuit, revient, se défait, se
refait. Tout cesse, sans cesse. On dirait l’insurrection des molécules,
l’intérieur d’une pierre un millième de seconde avant qu’elle ne se
désagrège.
C’est ça, la littérature."
Samuel Beckett, Le Monde et le pantalon, 1989.
Je rajoute autre chose...un poème, sensuel...beau...tellement beau. Ecrit par un incontournable, le poème est lui-même assez connu, il reflète certaines pensées que j'ai et que nous avons tous. Je n'étais pas déja d'une humeur très bonne, alors quand j'ai lu cela ça m'achevé. Mais je suis presque content, c'est bel achèvement au moins...
Laisse-moi
respirer longtemps, longtemps, l'odeur de tes cheveux, y plonger tout
mon visage, comme un homme altéré dans l'eau d'une source, et les
agiter avec ma main comme un mouchoir odorant, pour secouer des
souvenirs dans l'air.
Si tu pouvais savoir tout ce que je vois! tout ce que je sens!
tout ce que j'entends dans tes cheveux! Mon âme voyage sur le parfum
comme l'âme des autres hommes sur la musique.
Tes cheveux contiennent tout un rêve, plein de voilures et de
mâtures; ils contiennent de grandes mers dont les moussons me portent
vers de charmants climats, où l'espace est plus bleu et plus profond,
où l'atmosphère est parfumée par les fruits, par les feuilles et par la
peau humaine.
Dans l'océan de ta chevelure, j'entrevois un port fourmillant de
chants mélancoliques, d'hommes vigoureux de toutes nations et de
navires de toutes formes découpant leurs architectures fines et
compliquées sur un ciel immense où se prélasse l'éternelle chaleur.
Dans les caresses de ta chevelure, je retrouve les langueurs des
longues heures passées sur un divan, dans la chambre d'un beau navire,
bercées par le roulis imperceptible du port, entre les pots de fleurs
et les gargoulettes rafraîchissantes.
Dans l'ardent foyer de ta chevelure, je respire l'odeur du tabac
mêlé à l'opium et au sucre; dans la nuit de ta chevelure, je vois
resplendir l'infini de l'azur tropical; sur les rivages duvetés de ta
chevelure je m'enivre des odeurs combinées du goudron, du musc et de
l'huile de coco.
Laisse-moi mordre longtemps tes tresses lourdes et noires. Quand
je mordille tes cheveux élastiques et rebelles, il me semble que je
mange des souvenirs.
Un Hémisphère dans une chevelure de Beaudelaire